Retour vers l’antique : croisière en Méditerranée

L’hédonisme torride d’un superbe torse marmoréen du dieu romain Sylvanus, figure tutélaire des bois et forêts, va à lui seul enflammer les sens (galerie Chenel, stand nº62) ! Toute l’élégance féline de la divinité Bastet à l’oreille percée d’une boucle en or (Egypte, 26e dynastie, 664 – 525 av. J-C) veille sur la galerie Gilgamesh, une autre galerie parisienne spécialisée dans l’art égyptien, mésopotamien, grec, romain (stand nº129). Un heaume corinthien en bronze (350.000 euros) séduirait même Dark Vador (Phoenix Ancien Art, stand nº87). J. Bagot Arqueología – Ancient Art offre une intaille en cornaline sertie d’argent présentant un crabe de mer superbe de naturalisme saisissant un papillon dans ses pinces, allusion à la devise de l’empereur Auguste : Festina Lente… – prix indicatif : 3.600 euros (stand nº130). Parmi une vingtaine de spécialités artistiques, l’événement connaît une déferlante archéologique. Une dizaine de galeries belges et étrangères, toutes de très haute qualité, offrent une fabuleuse croisière en Méditerranée, sans   compter les arts asiatiques anciens, primitifs et précolombiens. Quand différents pays telles la Turquie ou la Chine poussent à la course aux restitutions, pourquoi ce retour à l’antique ?

« En Belgique, l’intérêt pour l’archéologie est le fruit d’une longue tradition dès le XIXe siècle et même avant, remarque l’antiquaire de la rue des Minimes Jacques Billen (Harmakhis Archéologie, stand nº107). Cette forte présence d’antiquaires spécialisés dans l’archéologie est le résultat d’une stratégie que je mène de longue date. J’ai créé la Brussels Ancient Art Fair à Bruxelles pour amener de nouveaux noms et attirer un public étranger. Puisque nous avons un nouveau président tout à fait intègre et ambitieux, désireux aussi d’attirer de nouveaux acheteurs, j’ai encouragé un certain nombre de mes collègues à me suivre à la Brafa. Ce mouvement va certainement s’amplifier l’année prochaine. »

Ce retour à l’antique correspond-il à une valeur refuge, une assurance « omnium » ? « Pour moi, un objet d’art détient ce qu’un produit de consommation comme un frigo ou un aspirateur ne possédera jamais : une valeur culturelle ajoutée. Bien sûr, c’est un investissement, reconnaît Jacques Billen. Son rôle premier n’est pas de servir de valeur refuge. Effectivement, mon domaine est un domaine sain, heureusement pas livré à la spéculation. »

Confronté à ces pièces muséales voire à certains objets dits de curiosité comme une fibule, vers quoi faut-il se diriger si l’on débute une collection ? « Les objets très accessibles existent, reprend le galeriste. Il faut délimiter ce que l’on veut et ce que l’on peut s’offrir. Un petit scarabée égyptien de qualité muséale vendu 200 euros prouve que le plaisir n’est pas fonction du prix. Avant de débuter une collection, il faut se renseigner auprès de plusieurs antiquaires, former son goût, visiter des musées, se faire une idée des valeurs. On est comme un enfant qui apprend à marcher, il faut compter six mois d’apprentissage avant de se lancer. Je conseille de commencer par acquérir de petits objets. Le rôle de l’antiquaire est de conseiller mais aussi de former des collectionneurs dans un rapport d’amitié et de confiance. Rien à voir avec une salle de ventes, un monde de fric et de records assez pervers où l’on peut se faire pigeonner. »